Pourquoi ce Blog ? Le Manifeste du Cycliste Poche

Le diagnostic, c'est une façon polie de dire: «Votre chemin vient de changer de carte. Et elle est pleine de nids-de-poule.» Apprendre que Xavier était atteint d'une IMC, c'était d'abord le vertige. Un de ces moments où l'on se sent tomber sans fin dans un puits d'interrogations qui sent le formol. Oui, j'ai pleuré. Pas des larmes de cinéma, juste la vérité brute qui sort par les yeux. C'est l'étape obligatoire avant la négociation. Mais on ne peut pas rester figé devant un enfant qui grandit. Après quelques semaines passées à digérer l'absurdité du Destin, on se fait à l'idée. La route sera longue, celle de la rééducation vers la marche. C'est le prix à payer. On nous a dit que sa diplégie spastique était «frustre», la forme la plus légère. La plus gentille des tragédies. Ça me fait rire jaune. Même la misère a ses catégories, n'est-ce pas? Alors, pourquoi ce blog? Parce que dans la pénombre de la forme frustre, on se sent souvent seul. On nous dit que «ce n'est pas si grave», mais ce n'est pas une réponse concrète pour un parent qui se demande si son enfant tiendra un jour sur un vélo sans avoir l'air d'un manchot pris dans la mélasse. Je veux rejoindre ceux qui ont aussi reçu cette étiquette légère, ceux qui n'osent pas trop se plaindre mais qui cherchent désespérément un mode d'emploi. Ce blog est un phare, un cri de ralliement, pour que nous puissions échanger nos trucs, nos victoires minuscules et nos moments de désespoir. Parce que parfois, il faut se parler franchement, sans le filtre de la compassion molle. On est dans la même galère, alors autant rire de nos misères et des vélos qu'on n'apprendra jamais à bien monter.

Le Mercredi Soir : La Non-Athlète et le Soulagement Conjugal

Mercredi soir. L'heure de la fatigue, celle où les filtres tombent et où la vérité sort, souvent sous sa forme la plus simple. On était là, le chéri, Xavier et moi. Xavier faisait sa chorégraphie de la marche assistée, un ballet de jambes raides et croches tenu par nos mains, pendant qu'il essayait de promener un chariot.

Et c'est là que le chéri a lâché le morceau. De vive voix. Sans aucune tristesse, avec le ton d'un homme qui constate que le ciel est bleu: «Bon, Xavier ne va sûrement pas devenir un athlète de haut niveau»!


Et là, mes amis, c'était le soulagement de l'âme. C'est le genre de phrase qu'on comprend dans la tête depuis le diagnostic, qu'on accepte en silence, mais qu'on n'ose pas formuler à deux. On a peur de briser l'espoir de l'autre, de prononcer l'interdit. Moi, je l'avais compris depuis belle lurette, que les Olympiques, c'était mort. Mais l'entendre de sa bouche, c'était un permis de ne pas avoir d'attentes démesurées. 


Un poids s'est envolé.


On est maintenant au niveau zéro, au plancher des vaches. On se concentre sur la marche, pas sur le podium.


Je ne dis pas que je suis une roche. J'ai facilement le cœur à la flotte et les yeux humides quand je le vois promener ses chariots à genoux, alors qu'à son âge, il devrait le faire debout, les petites jambes bien droites. C'est l'image qui nous rappelle la différence, l'injustice. Mais vous savez quoi? Le moral est bon.


Parce qu'on revient toujours à la même phrase, le mantra de la survie: Xavier n'a que de la diplégie spastique. Il est là. Il gueule quand il ne comprend pas. Il sera un piètre cycliste, mais un excellent saboteur de plomberie. Ça aurait pu être bien pire. Ça aurait pu être la mort, la maladie qui ronge, l'absence d'avenir.

Alors, on s'accroche au «fruste» comme à une bouée. On s'équipe d'IRM et de neurologues, parce que l'amie neurochirurgienne a dit qu'il faut être proactif. Mais on s'autorise aussi à rire du non-athlète et à apprécier le simple fait de l'entendre prononcer «Maman l».


C'est ça, la vie avec Xavier: une course d'obstacles, mais une course qu'on a le privilège de regarder.

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Commentaires

  1. Un handicap, invisible au pas, c'est toujours difficile à vivre pour les parents... Ça peut isoler et même éloigner. Tant mieux alors pour ce stress en moins.

    Je ne pensais pas que nos vies, quoi qu'inversées, pouvaient se ressemblet aurant. Je suis là, pas toujours toute là, mais sache que ce soir, je pense à toi!

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    1. Mamanbooh,

      J'ai eu la même réflexion que toi, nos vies se ressemblent même si les événements ne surviennent pas en même temps pour toi et moi.
      J'espère qu'un jour on pourra aller boire un café ensemble !

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