Le Coup de Fil du Doute : Quand l'Intuition Défie le Diagnostic
Le «probable» et le «frustre». Ce sont les mots que la médecine a déposés sur mon cœur, comme des petits cailloux polis. Mais je vous le dis, le doute est tenace. J'ai un plus ou moins bon feeling concernant Xavier et cette fameuse diplégie spastique de forme frustre.
Je n'ai pas vraiment l'impression que ce sera simple. Et surtout, je n'ai pas l'impression qu'il l'ait aussi légèrement qu'on le prétend. Je sais, je ne suis pas médecin. J'ai le droit de me taire. J'ai même eu besoin qu'une pédiatre de passage me lance le diagnostic à la figure pour que je voie l'évidence. On est tous un peu cons avant d'être informés.
Mais maintenant que la conscience s'est réveillée, elle est vorace. Je le vois, moi, le big problem dans sa démarche. Dans sa façon de se mouvoir, il y a une résistance, une petite tragédie du corps qui refuse de se conformer à l'étiquette «la plus légère». C'est l'intuition du parent, ce sixième sens qui s'allume lorsque les faits ne collent pas avec le ressenti. Le diagnostic est une chose, la vie de mon fils en est une autre.
Alors, ce soir, je vais transgresser. Je vais ignorer le consensus de l'hôpital et aller chercher ma propre vérité. Je vais lâcher un coup de fil à une ancienne camarade d'école. Une de celles qui, à force d'étudier la misère du cerveau, est devenue neurochirurgienne pédiatrique. Une femme qui connaît ce problème comme elle connaît ses propres poches.
Elle m'a invitée. Elle m'a dit: «Appelle-moi. Je vais t'informer de tout ce que tu devrais savoir.» Passer à côté de cette opportunité, alors que mon cœur crie au loup, je serais folle en mautadine.
C'est l'appel du banc d'école qui va défier la bureaucratie médicale. C'est l'amitié qui va tenter de percer le mystère du «probable». On verra bien ce qu'elle me dira. Si elle confirme mon angoisse, ou si elle me remet à ma place de mère paranoïaque. Dans tous les cas, j'aurai fait le nécessaire. Parce que la vérité, on ne la reçoit pas, on va la chercher. Même si ça implique de déranger une chirurgienne en soirée.
L'Appel Nocturne: La Neurochirurgienne et l'Horreur Absolue
(Le bruit du téléphone qui décroche. La voix, fatiguée mais familière, de l'amie neurochirurgienne.)
Elle: Allô? C’est toi? Enfin! Je m’attendais à ton coup de fil. Raconte-moi ça, ma belle.
Moi: Écoute, merci de prendre ce temps, ça vaut de l’or. C’est pour Xavier. Tu sais, la pédiatre de passage, l’hôpital, le «probable»... On parle d'une diplégie spastique. La forme fruste. La plus légère, qu'ils disent.
Elle: (Un soupir, le bruit d’une feuille qu’on tourne, peut-être le dossier que j'ai envoyé.) Oui. J’ai lu vite fait. C’est ça qui ne te convient pas? Le «fruste»?
Moi: Exactement. Je sais, j’ai l’air d’une folle. J’ai zéro diplôme en médecine, mais quand je vois mon gars se mouvoir, la façon dont il se débat avec ses jambes... Ça me semble être un problème big. Pas juste un petit bobo de physio. On dirait qu'on veut me rassurer avec un mot doux, alors que moi, je sens l'horreur absolue sous la surface.
Elle: (Sa voix devient plus professionnelle, mais toujours avec cette tendresse d'ancienne camarade.) Je comprends. Le corps, ma chère, a une façon bien à lui de contredire les étiquettes. Et puis, la diplégie spastique, ce n'est jamais simple, même dans sa forme « frustre ». C'est juste que les conséquences, elles, le sont souvent moins pour la vie de tous les jours. C'est plus une question de distance entre la normalité et le glisse foufounes, si tu vois ce que je veux dire.
Moi: Je vois. Mais ce qui me ronge le plus... elle m’a dit que ça venait d’un stroke à l’accouchement. L'impression d'avoir raté ma tâche d'incubateur, tu comprends? C'est ma faute, n'est-ce pas? Mon corps qui a mal géré la sortie. Dis-moi que je suis conne de penser ça, je t'en prie.
Elle: (Un petit rire sec, de celle qui a vu trop de culpabilité parentale.) Écoute-moi bien. La vie est une série de hasards brutaux. Tu n'es pas coupable. Ce n'est pas ta « faute». Ton corps a fait ce qu'il a pu. Si on cherchait un coupable pour toutes les anomalies de la gestation, on passerait notre temps à s'accuser. L'important, c'est ce qu'on fait maintenant. La question n'est pas «Qui a fait ça?» mais «Qu'est-ce qu'on fait pour le vélo?»
Moi: (Un soupir de soulagement teinté de cynisme.) L'éternelle question du vélo... Bon. Alors, dis-moi ce que tu ferais. Si c'était ton enfant, avec ces petites jambes qui ne veulent pas coopérer, et ce cerveau qui nous bloque la toilette avec du papier cul... Que ferais-tu au-delà de la simple physio?
Elle: Au-delà de la physio? Écoute, si l'étiquette est «fruste», on commence par la physio, c'est la base. Tu as rendez-vous, c'est parfait. Mais comme tu n'es pas la mère à se contenter du probable, et comme tu as un peu raison d'écouter ton instinct – ton fils n'est pas juste maladroit, il y a une lésion, on va être proactif.
Moi: Proactif. J'aime ça. Ça sonne moins comme la passivité de la culpabilité.
Elle: Exactement. Premièrement: ne te fie pas juste à l'œil. Ton physiatre va bien évaluer la spasticité. Mais demande-leur s'il y a lieu de faire un IRM cérébral. C'est crucial. L'IRM ne changera pas le traitement, mais ça confirmera la lésion, le fameux stroke du périnatal. Ça te donnera une certitude, et ça t'aidera à mettre une croix sur ton idée de «mauvaise incubatrice». S'il y a une anomalie bien visible, tu arrêteras de penser que c'est une humeur passagère de ton corps.
Moi: Un IRM... OK. Je note ça. Et ensuite ? Au-delà de l'imagerie et de la danse thérapeutique?
Elle: Ensuite, tu vas chercher la meilleure équipe. La meilleure filière de réadaptation pour l'IMC au Québec. Tu es chanceuse, on en a des excellentes. Même si la physio est légère au début, tu veux être en contact avec les gens qui font ça toute la journée. Tu as besoin d'une évaluation par un ergothérapeute pour tout ce qui est posture et aides techniques, même s'il est un génie du Monsieur Patate, ça peut aider. Et tu n'hésiteras pas à consulter un neurologue pédiatrique spécialisé en IMC. Ne te contente pas de la paperasse. Tu as le droit d'avoir l'opinion d'un expert du cerveau, juste pour te rassurer sur l'étendue de la lésion et pour évaluer les risques potentiels futurs.
Moi: (Je sentais la liste s'allonger, mais le brouillard se levait.) Neurologie. Ergothérapie. La meilleure filière. Tout ça pour un «fruste»...
Elle: C'est ça. Le fruste est fourbe. Il te fait croire que tu peux te reposer, alors qu'il faut être plus vigilante que jamais. Tu auras peut-être besoin d'injections de Botox un jour, pour relâcher les muscles trop spastiques. Tu auras peut-être besoin d'orthèses. Tu as besoin d'être dans la bonne clinique pour ça. Agis comme si c'était une forme sévère, et tu seras agréablement surprise si ça reste léger. Agis comme si c'était léger, et tu vas te mordre les doigts. C'est simple.
Moi: (Je riais un peu, cette drôle de vérité était libératrice.) OK. Je comprends. On met le paquet. Même s'il est excellent à dévisser les bouchons. Merci. Sincèrement.
Elle: Fais-le pour lui. Fais-le pour toi. Et arrête de t'en faire avec la culpabilité. On se reparle après ton IRM. Maintenant, va te coucher. Et enlève le papier cul de la toilette, ça, c'est ta tâche.


Bon courage avec ton petit homme vous êtes capable de le stimuler et l'aider j'en suis certaine
RépondreSupprimerMerci Marie-Claude. Eh oui ! Nous sommes capables de tout pour aider bonhomme. LOL
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